Il y a eu la femme à barbe, l’homme le plus gros du monde, le plus petit aussi, l’étrange fakir des Indes mystérieuses, la charmeuse de serpent, la femme à 2 têtes, aujourd’hui, il y a Buzzfeed et ses avatars.
Pour les personnes qui ne connaitraient pas, il s’agit de sites qui jouent leur part d’audience sur le fait que leur contenu va devenir viral, créer le buzz, c’est à dire, pour les gens au parlé ordinaire, se répandre avec la rumeur, numérique de nos jours. La plupart du temps, tout se joue dans les titres racoleurs des articles. Avec les mêmes ressorts que les cirques de l’étrange d’antan. Ils jouent sur la curiosité, la simplification, le superlatif et bien sûr les émotions.
Comment faire plus simplistes et angoissant que ” les 3 choses que vous regretterez de ne pas avoir fait quand vous serez vieux”? (1-Adopter un l’animal disparu dans votre salon tel un panda 2-Avoir pris des cours d’autodéfense intellectuelle avec Phloem 3-Avoir éteint internet plus tôt?)
Comment faire plus intriguant et attendrissant qu’en disant “Il dit bonjour à sa fille, vous ne devinerez jamais la suite…” ? (Elle lui dit bonjour aussi?)
Comment faire plus superlatif (et tarte) que “Cette homme a la plus belle écriture du monde“? (Euh… C’est une pub pour un stylo…)
Il est étonnant de constater que, bien que les outils soient numériques, le fond est quand même très semblable. Avec pourtant cette illusion d’actualité et d’accès à des informations que nous n’aurions pas eu avant. Comme si avant Internet, on ne découvrait rien… Et on y retrouve les mêmes émerveillement et stupéfaction. Encore et encore alors que c’est toujours les même ressorts voires les mêmes choses à peine déclinées ( “Le saut en parachute/en tyrolienne/en combinaison volante/à la perche le plus haut du monde.” Des gens qui dépassent leurs limites personnelles, qui tombent et…quoi… je dois être inspiré ou juste satisfait au niveau de ma curiosité?)
Quand j’y pense un peu plus en détail, les émissions dites de “télé-réalité” type “Montrez nous votre talent.” jouent aussi là dessus. (En confondant d’ailleurs souvent talent et travail, pour des raisons que je vous laisse trouver… ) Avec par ici une petite dose d’abjecte en supplément avec un jury qui évalue et peut décider en directe de la valeur du talent, avec option humiliation publique…Ou, par là, une petite dose moralisatrice du type “Aha! Tu croyais que la grosse moche allait mal chanter mais non! Elle fait de l’opéra!”
Au moins, dans les cirques de l’étrange, les monstres conquéraient de la dignité.
Et il ne passait qu’une fois par an…